Découvrez la photographie en pose longue avec l’interview de Michael Portillo

Comment vivre de ses passions voyages et photos ? C’est le pari qu’a réussi Michael Portillo depuis plusieurs années.

Découvrez la pose longue et ses secrets avec Michael Portillo dans cette interview avec le Salon de la Photo

Passionné par les voyages et la photo, Michael Portillo a pu transformer sa passion en profession depuis une dizaine d'année.

Pouvez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Michael Portillo, je suis photographeprofessionnel depuis une dizaine d’années, je suis spécialisé dans la photographie de paysages et de nature, et notamment la photographie de pose longue.

Une grosse partie de mon métier est également d’accompagner les gens pour réaliser des images. En effet, la formation est une partie importante de mon métier. Mon cœur de métier c’est de développer et d’encadrer des voyages photos à l’étranger.

Je travaille en partenariat avec des agences de voyages, nous créons des circuits spécifiques pour faire découvrir des lieux aux gens, mais surtout les formerà la photographie. La pose longue fait partie de mon travail. Pour cela, je travaille avec des marques de filtresoptiques. Je suis ambassadeur pour la marque Cokin.

 

Comment êtes-vous venu à la photographie ?

À la base, je suis issu du commerce international, donc pas de rapport direct avec la photographie mais cela a toujours été depuis le début une passion de plus en plus importante pour moi. À un moment j’ai eu envie de changer de voie et j’avais deux passions : la photographie et les voyages. J’ai cherché à allier ces deux passions. Cela est devenu mon métier à temps plein depuis plusieurs années maintenant. Je suis autodidacte en photographie comme pas mal de mes collègues. La photo est devenue plus accessible et s’est démocratisée. On est plus obligé de faire de grandes écoles de photographie pour en faire son métier.

 

Qu’est-ce qui vous influence le plus la nature ou le milieu urbain ?

Ce que je préfère faire, c’est le travail sur la nature, les paysages. Je fais aussi de l’urbain, car je fais partie de ces photographes qui ne se ferment à rien.

Pour la pose longue, je vais plus facilement travailler en milieu naturel, sur les paysages, alors qu’on peut très bien travailler également en milieu urbain. Pour ce qui me concerne, ma créativité s’exprime plus facilement dans le milieu naturel.

Photo en pose longue de cascades
© Michael Portillo

 

Comment choisissez-vous vos thématiques nature ?

On peut remarquer que l’eau est assez présente sur toutes ses formes. C’est une question d’intérêt pour le sujet et d’opportunité. Quand on travaille la pose longue dans le milieu naturel, l’eau revient facilement car cela fait partie de ces éléments qui bougent et qui se prêtent facilement à un travail de pose longue. Par ailleurs, je suis également attiré par les pays où l’on retrouve de la glace : la Scandinavie, la Finlande, l’Islande…

 

Est-ce qu’il y a des pays ou des sujets qui se prêtent davantage à la pose longue ?

Bien-sûr, à partir du moment où il y a des mouvements (eau, nuages, véhicules, passants…), tout cela se prête à la pose longue. La pose longue peut aussi avoir sa place dans le milieu du sport. Normalement la photographie voudrait que l’on travaille à vitesse rapide. Certains de mes collègues travaillent en pose longue sur le sujet de la danse. Cela donne des séries un peu abstraites.

En fait, il n’y a pas de limite à la pose longue, et c’est ce qui est intéressant. Même quand on pense maîtriser un sujet dans la pose longue, c’est toujours différent, selon la vitesse à laquelle va aller le sujet. Chaque photo de pose longue et différente. On peut travailler ce style de façon presque infini.

Photo d'une église en pleine nature la nuit avec les étoiles formant des cercles
© Michael Portillo

 

Quelles sont les caractéristiques de la pose longue ?

Si l’on veut travailler la pose longue, on va d’abord travailler la vitesse d’obturation. Si on travaille avec une vitesse rapide, cela va figer le mouvement, si on travaille avec une vitesse lente, cela va filer le mouvement. Donc d’abord il va falloir maîtriser sa vitesse. Ensuite quand on gère la vitesse on va avoir un effet sur le rendu du mouvement.

Il y a aussi un impact sur le rendu technique, c’est-à-dire la quantité delumière qui va rentrer dans l’appareil. Donc il faut veiller à ne pas obtenir des images qui vont être surexposées avec un trop-plein de luminosité. Quand on travaille de nuit, il n’y a pas de problème. En revanche, quand on travaille de jour, ce phénomène de surexposition peut apparaître. Donc il faudra contrebalancer ça avec du matériel et notamment des filtres optiques.

Ensuite, il faut faire attention à tout ce qui est flou de bougé, ou de mouvement. Il est important de stabiliser son appareil avec l’utilisation d’un trépied.

Ce qui est intéressant en pose longue, c’est le rendu du mouvement. La vitesse et le mouvement sont relatifs. Il y a une part d’expérience dans le travail de la pose longue qui est très importante. Par exemple, si on veut travailler sur les vagues, il faut comprendre comment se forment le mouvement pour anticiper le résultat que l’on cherche à avoir. Donc il faut faire attention à des points techniques et créatifs.

 

Quel matériel équipement utilisez-vous pour réaliser des poses longues ?

Il faut un appareil qui permette de gérer les paramètres d’exposition de manière manuelle, notamment la vitesse qui est le paramètre principal. Tout ce qui est trop automatisé ne permet pas ces réglages.

On peut travailler la pose longue avec tout type d’appareil à partir du moment où on peut gérer la vitesse, que ce soit avec un réflexe, un hybride, un contact expert, et même de plus en plus, un smartphone !

 

Avez-vous noté des demandes particulières depuis ces dernières années de la part de vos clients ?

Les changements de pratiques concernent davantage le nouveau matériel. Il y a quelques années, je n’avais pas de clients qui voulait partir faire un voyage photo avec un smartphone. Aujourd’hui cela se voit de plus en plus. Avant le voyage photo, c’était réservé à des initiés, qui avait du matériel et des connaissances pointues. Finalement, cela s’est démocratisé, on accueille des gens qui n’ont même pas de connaissances en photographie qui viennent là pour apprendre. D’autres personnes viennent avec du matériel beaucoup moins perfectionné qu’avant.

Photo en noir et blanc
© Michael Portillo

Peut-on rater une photo en pose longue ?

Oui, mais c’est plus compliqué car il y a un côté très abstrait dans la pose longue. On ne prend pas une photo qui va représenter la réalité. Effectivement, une photo complètement surexposée est une photo ratée.

 

Comment pourriez-vous définir une pose longue ?

Ce n’est pas une superposition de plusieurs photos. Une pose longue c’est l’obturateur qui va s’ouvrir et qui va permettre à la lumière d’arriver sur le capteur pendant un tempsdonné. Donc c’est vraiment la réalisation d’une seule image. C’est le mouvement qui va s’enregistrer sur une seule image. On est vraiment dans la prise de vue unique avec un effet de mouvement qui va s’inscrire. La pose longue, c’est presque du cinéma à l’image de la photo.

 

Combien de temps le processus vous prend-t-il pour obtenir une photo en pose longue ?

En pose longue, si on vient avec un état d’esprit d’immédiateté, on va être frustré. Dans un premier temps, il faut réfléchir à l’image, essayer de l’imaginer.

Ensuite, il faut souvent faire plusieurs photos avant d’arriver à faire celle qu’on imaginait. Parfois il faut venir et revenir sur le spot parce qu’on n’a pas les bonnes conditions : le vent ne pousse pas les nuages comme on voudrait, les vagues ne sont pas assez fortes… C’est variable, mais c’est souvent un temps beaucoup plus long qu’une prise classique.

Cage d'escalier d'un immeuble en verer
© Michael Portillo

 

Comment définiriez-vous la photo de perspective ? Ou utilisation la perspective en photo ?

La perspective peut être comprise sous deux aspects :

Le côté spatial, comment va-t-on agencer les plans ? Utilisation de l’espace en photo est très important car on retransmet un monde qui est en trois dimensions sur un monde qui est en deux dimensions. Donc il faut permettre à l’œil de se représenter l’espace. La perspective c’est la gestion de l’espace, comment vais-je organiser les plans ?

Cela peut être aussi la perspective émotionnelle. Comment est-ce que à la lecture d’une image je vais permettre à quelqu’un de comprendre ce qu’il y a derrière et donc de créer une perspective avec l’imaginaire ?

Donc, dans la perspective, il y a ces deux côtés : le spatial et l’émotionnel.

 

Pour faire une photo de perspective spatiale, quelles sont les bons sujets, les conditions ?

Je pense que tout peut se traiter sous l’angle de la perspective. Une des techniques les plus simples, c’est la profondeur de champ. C’est-à-dire gérer la quantité de netteté, et la quantité de flou dans une image. Donc il faudra travailler avec des plans serrés. Plus on va utiliser une focale longue, plus on va être proche du sujet, plus on va réduire la profondeur du champ. Donc il faudra se contraindre à des cadrages plus resserrés.

Si on veut traiter la perspective sous un autre angle, on bascule sur le paysage à l’ultra grand angle, il faudra créer la perspective par l’agencement des éléments. Une des façons dont on travaille en tant que photographe pour donner de la perspective à un paysage, ce sera de placer un personnage dans le paysage.

Aurore boréales
© Michael Portillo

 

Utilisez-vous des drones, qu’est-ce que cela représente dans la photographie pour vous ?

Oui, c’est un outil qui devient de plus en plus indispensable. On a de plus en plus de demandes de clients pour ce type d’image. Dans la démarche créative, je reste malgré tout plus mitigé. Il y a eu un engouement autour de ce nouvel outil. Quand les appareils ont été proposés au début, on voulait tester. C’est vrai que c’était innovant, on n’avait pas l’habitude de voir le monde comme ça. Malgré tout, la législation s’est beaucoup renforcée, la pratique du drone est très limitée en France. Même dans les endroits où on peut voler, c’est avec des hauteurs limitées. Il y a tout de même beaucoup de contraintes.

Et puis, je trouve qu’il y a une certaine redondance dans les images. On fait plus vite le tour vu d’en haut que vu d’en bas. À mon sens, il y a moins de créativité avec les images prises au drone. J’ai aussi l’impression que c’est moins ma création. En définitive, le drone m’intéresse plus pour la vidéo que pour la photo. Je préfère la photo et les pieds sur terre.

 

Pouvez-vous nous raconter quelques petites anecdotes qui vous ont marqué ?

Ce que je retiens, c’est que j’ai découvert les voyages de façon différente avec la photographie mais encore plus avec la pose longue. On reste sur les spots encore plus longtemps donc on a un autre regard sur l’environnement grâce à la pose langue.

Dans l’univers marin, il y a des dangers, il faut faire attention quand on travaille en pose longue aux vagues par exemple. J’ai vu un nombre de fois incalculables des gens avoir des problèmes avec leur matériel car ils s’approchaient trop près d’une vague et là tout part ! Quand c’est juste le matériel on relativise, mais quand c’est l’élève qui part dans une vague c’est plus dangereux. La règle numéro un quand on fait de la photo c’est la sécurité avant la photo. 

Une des meilleures photos que j’ai faites, c’est une photo que je n’avais pas prévu. J’étais à Bali, je faisais de la pose longue sur des paysages de cascades et en rentrant vers mon véhicule, j’ai vu un petit gamin dans une rizière. C’est une photo que j’ai faite, qui est très réussie et surtout que je n’avais pas prévu. La photo c’est toujours rester ouvert et émerveillé.

Pour conclure je dirais pour qu’une photo soit réussie, il faut que les gens soient capables de comprendre l’émotion qu’il y a derrière.

Enfant dans une rizière
© Michael Portillo

 

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