Adrien SELBERT
Adrien Selbert n’est pas photojournaliste. Il est réalisateur, monteur et photographe. En 2005, sur un coup de tête, il part en Bosnie avec une amie. Vingt-quatre heures plus tard, le pays lui « saute au visage ». Dix ans après le plus grand massacre en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale – plus de 8 300 hommes tués en trois jours à Srebrenica –, les maisons sont à peine reconstruites et les plaies sont toujours présentes, dans les esprits comme sur les façades. Il y retourne l’an dernier pour dresser un portrait de cette jeunesse de Srebrenica, la génération d’après le génocide qui a tout juste 20 ans. C’est en discutant avec les jeunes du coin qu’il devine que « la nuit de l’histoire ne s’est jamais vraiment levée », et décide précisément de photographier la nuit pour exprimer ce sentiment de mélancolie. Habitué à l’image documentaire, il travaille sans flash et sans pied, à main levée, se laissant guider par les lumières et les situations qu’il rencontre. Loin de la grammaire habituelle des photos de presse, son traitement des couleurs, tout en douceur, exprime avec justesse un sentiment de malaise qui perdure.
« Vivre à Srebrenica, c’est faire l’expérience de ce temps indéfinissable qu'est l'après-guerre. Si chacun sait quand commence cet après, qui peut dire quand il s’arrête ? Naître à Srebrenica est une injustice pour qui a 20 ans et veut simplement boire et faire l’amour », précise Adrien.
Portrait de l'artiste
Diplômé des Beaux-Arts de Nantes et des Arts décoratifs de Paris, Adrien Selbert, 30 ans, est réalisateur et photographe. Il travaille aussi comme scénographe vidéo pour le théâtre et mène une activité d'éducation à l'image au travers de workshops et d'actions culturelles. « Srebrenica, nuit à nuit » est son premier « vrai travail photographique pensé comme tel de bout en bout » et constitue la première étape d’un travail photographique au long cours autour de cette question « La Bosnie existe-t-elle ? ».