Rodolphe Sebbah

Publié le par Thierry Combe - mis à jour le

Rodolphe Sebbah présenté par Vincent Trujillo – Le Monde de la Photo

RODOLPHE, L’ESPIÈGLE

"En découvrant sur Internet les photos de Rodolphe Sebbah, c’est immédiatement cet adjectif qui m’est venu à l’esprit pour vous présenter ce photographe attachant et talentueux. Les photos de Rodolphe sont une joie de l’esprit et une sempiternelle invitation à redécouvrir le monde qui nous entoure, surtout celui qui s’anime et se déroule dans notre rue. La ville est le terrain de jeu exclusif de Rodolphe Sebbah qui se définit comme un photo-reporter de rue. Au cœur de ce brouhaha moderne, il use de tous les accidents malicieux et impromptus de la cité pour révéler des images éphémères et souvent cocasses. Dans la lignée des René Maltête ou encore Elliott Erwitt, l’humour tient une place importante dans les photos de Rodolphe ; « je suis très attentif aux excentricités du quotidien. Je joue souvent avec les affiches, les slogans publicitaires, les enseignes des magasins. Ils sont une source inépuisable de clins d’œil et de photos amusantes ou absurdes. » Sa dextérité de photographe nous livre des anecdotes mutines et savoureuses qui composent notre paysage urbain. À travers ces « instantanés » (au sens le plus strict du terme), le photographe privilégie ces courts instants qui se dérobent à notre vue. Certains lui reprocheront quelques cadrages trop précipités ou une frénésie trop assumée ; peu importe, la démarche photographique de Rodolphe n’est pas « esthétisante », il photographie au « ras du trottoir » comme il aime à le répéter, avec comme source d’inspiration le challenge de « capter le théâtre de la rue sans me soucier de ce qui est beau, laid, confortable ou dérangeant. Ma seule exigence est la spontanéité. » Aux préparations scénographiques trop rigoureuses, il préfère la technique jubilatoire du « snapshot ». Mais il serait indécent de ne pas voir l’expression d’un talent opiniâtre et aguerri qui sied à certains photographes dont les images nous montrent à voir les choses. Indéniablement, aux plus hérétiques des scènes de rue et des milieux urbains, Rodolphe Sebbah fait aimer la ville et ses gens. Ce sens de la poésie, il le partage avec enthousiasme sur son site Internet comme autant
de parenthèses captées au gré de ses pérégrinations urbaines. Toute une découverte ! En cela sa participation aux ZOOMS 2014 était légitime tant Rodolphe, l’espiègle, transforme notre vision du quotidien. Et d’un coup le monde est plus léger, plus joyeux !"

Vincent Trujillo
Directeur des rédactions lemondedelaphoto.com

 

PORTRAIT DE L'ARTISTE

Rodolphe Sebbah a 56 ans et vit à Paris depuis l’âge de 18 ans. Paris, sa ville comme il aime à le répéter : il l’aime, il l’a connaît, il l’a sent et rien ne lui est plus insupportable que les rares moments où il doit s’éloigner de ses rues et de ses tribulations. Pourtant rien ne prédestinait Rodolphe à embrasser la carrière de photographe. Diamantaire de formation, c’est dans ce milieu étrangement déconnecté du théâtre de la rue qu’il découvre au gré de ses lectures les travaux d’illustres aïeux : les américains Robert Franck, Garry Winogrand, Helen Levitt, Saul Leiter, Elliot Erwitt, mais aussi les français Henri Cartier-Bresson, Willy Ronis ou René Maltête. Tous ont marqué de leur empreinte cet art si particulier qu’est la « street photography ». Une véritable révélation, un choc visuel pour le futur photographe. Commence alors le long parcours de l’autodidacte. Boulimique, il compulse tout ce qui peut s’écrire ou se voir sur le sujet et ses maîtres: livres, magazines, expos. Il se détourne alors progressivement des éclats célestes du diamant pour regarder sa ville « au ras du trottoir » comme il dit. Le spectacle qui s’offre à lui le fascine, l’attire irrémédiablement vers ces scènes furtives qui rythment le pouls d’une cité. Dans
cette quête, Rodolphe capte ce qu’il appelle les beaux instants de la vie urbaine. Il livre sans fard au spectateur la banalité de situations aussi impromptues que cocasses. Peu à peu, il accumule de nombreux clichés. « Ce que vous voyez est ce que vous voyez. Il n’y a rien à voir ou comprendre au-delà de ce qui est montré. », cette maxime d’Helen Levitt que Rodolphe aime à citer symbolise parfaitement sa démarche photographique qui ne revendique aucun messages particuliers. Il montre un point c’est tout. Ses images, qu’il publie régulièrement sur Internet, commencent à être remarquées. Aux premières publications se succèdent les premiers encouragements. Adepte des focales fixes (50 mm f/1.4 – 35 mm f/2 – 28 mm f/2.8) à grande ouverture, il aime trouver sa distance par rapport au sujet qu’il photographie en mode « snapshot » repoussant le confort d’un zoom. Cette « vérité » qu’il recherche frénétiquement dans ses clichés contribue au « style Sebbah ». Brut de vérité et de spontanéité, il ne magnifie pas. Nous découvrons alors la multitude des détails aussi savoureux que truculents qui composent nos paysages urbains. C’est ce qu’on appelle un témoignage.